Salut, c’est Sébastien,

 

J’ai longtemps cru que dans une bière, l’important, c’est le goût.

 

Peu importe l’emballage.

 

Car l’emballage c’est secondaire.

 

Et bien, c’est pas tout à fait vrai.

1. Vade Retro

Au-delà de ma formation d’ingénieur, je pense avoir été conditionné à l’idée que le marketing, c’est mal : une sorte d’outil satanique développé par des manipulateurs en costards pour nous vendre des stylos dont on n’a pas besoin.

 

J’en ai eu ma claque des bières d’étiquettes, mettant fièrement en avant une ville ou une région, mais produites en République Tchèque.

 

J’en ai eu ma claque des bières aux fruits, sans fruit, blindée d’arômes artificiels.

 

J’en ai eu ma claque des mensonges affichés sans honte.

 

Et c’était la faute du marketing.

 

Je mélangeais tout.

 

Par ignorance.

 

Par faignantise intellectuelle.

 

Et beaucoup d’orgueil aussi.

 

2. Les client-e-s, toujours les client-e-s

Cette conviction avait pourtant des racines auxquelles je crois encore profondément : le produit prime sur l’emballage.

 

Je mets mes tripes dans les bières, parce que j’aime ça. Mais ce n’est pas moi le consommateur final.

 

J’en ai déjà parlé précédemment, la clé de la vente, c’est de donner envie au client d’acheter.

 

Et pour ça, il faut se mettre à sa place.

 

Et quitter notre habit de brasseur pour porter celui du consommateur : la première image conditionne notre avis sur un produit.

 

Et la première image, c’est l’étiquette.

 

Une belle étiquette, un apriori positif. Une vente potentielle.

 

Une étiquette moche, un apriori négatif. Une vente impossible. Et un client perdu.

 

3. Le visuel au service du produit

Pour illustrer l’évolution de mon avis sur l’importance de l’étiquette, laisse moi te parler d’une expérience.

 

À Bordeaux, on a brassé un Berliner Weisse en collab. Un chouette projet avec un brasseur parti s’installer à Berlin, qui a ramené des lacto directement de la capitale. On a bien rigolé, adapté notre process, bien galéré à nettoyer la cuve de brassage, bref : c’était un super moment entre brasseurs.

 

Après embouteillage, on a fait goûter la bière autour de nous, à d’autres brasseurs fans de ce style particulier.

 

Ils ont adoré.

 

De brasseur à brasseur, on parle de l’intention, du produit, des ingrédients, du process.

 

Mais on a pris une claque avec les clients.

 

Ils ont totalement boudé cette bière.

 

Car on a fait une erreur classique : penser technique sans intégrer la notion business.

 

On a complètement négligé l’étiquette. Ou plutôt on a voulu la faire en interne, parce qu’on va pas payer un graphiste pour ça quand même.

 

Aujourd’hui, j’ai compris que l’étiquette est un élément-clé de la bière.

 

4. Des attentes fortes

Depuis que j’ai compris ça, je me suis découvert un curieux réflexe : je génère des attentes fortes vis-à-vis de la bière par rapport au contenu de l’étiquette.

 

   Une étiquette peps et colorée ? Je m’attends à du peps, mais j’accepte les imperfections.
   Une étiquette sobre et épurée ? Je m’attends à un produit propre et bien fait.
   Un texte ambitieux et engageant ? Je m’attends à retrouver l’histoire en bouche.

 

Et les résultats sont variés :

 

   Parfois, la bière n’a rien à voir avec ce qui est raconté sur l’étiquette, ça me gonfle.
   Parfois, la bière n’est pas aussi bonne que l’image que je m’en suis faite, ça me déçoit.
   Parfois, c’est cohérent, ça me satisfait.
   Parfois, c’est encore mieux que ce que j’ai imaginé, ça me fout une claque.

 

Ces attentes fortes, je m’imagine qu’elles sont normales et que les clients de nos bières sont aussi exigeants sur cette cohérence.

 

Désormais, je traite l’étiquette avec le même soin du détail que le contenu de la bouteille.

 

5. Honnête avec les client-e-s

Poser une étiquette fluo et colorée sur une IPA fadasse, sans amertume ni aromatique, ça m’énerve.

 

Mettre en avant du CBD sur une bière sans le goût du chanvre, ça m’énerve.

 

Être ambitieux, parler de fruits, de sour, de gose, et retrouver ça dans la bouteille, j’adore !

 

Être simple dans son visuel et retrouver une bière simple et bien faite dans la bouteille, j’adore !

 

En tant que brasseur, en tant que brasseuse, notre objectif est de transmettre des émotions aux consommateurs, de les faire voyager, les emmener dans notre univers, leur faire découvrir des saveurs.

 

L’étiquette est un vecteur indispensable pour transmettre ces émotions.

 

Ça ne marche pas toujours, car tous les goûts sont dans la nature.

 

Mais tant qu’on est honnêtes, tant qu’on est vrais et cohérents, on ramènera des clients constamment.

 

Et toi, tu choisis tes bières selon l’étiquette ? Penses-tu qu’elle influe sur ta perception du goût ?

 

Bonne semaine à toi,

 

À vendredi,

 

Sébastien