Apprendre à brasser les bières de quelqu’un d’autre, c’est très formateur.
On s’essaye sur des produits connus : on sait ce que l’on cherche à obtenir et on assimile les différentes étapes pour y arriver. De même, on bénéficie des retours rassurants de l’équipe déjà en place, qui peut nous guider et nous aider à tout moment.
Comme un enfant qui apprend le vélo, on apprend dans un cadre relativement sécurisé.
Mais en tant que brasseur-se, on aspire surtout à créer ses propres produits, à mettre ses tripes sur la table, apporter sa patte à la brasserie et se challenger.
Ça t’es déjà arrivé d’imaginer voir tes propres bières à la carte d’un bar, d’un restau ou du magasin de producteurs locaux chez qui tu fais tes courses ?
Ça fait rêver, hein ?
Depuis que j’ai commencé à réfléchir à ma reconversion, c’était l’un de mes moteurs.
Un objectif à atteindre.
Comme une case à cocher dans mon processus de transition.
Une étape à passer pour me sentir brasseur professionnel.
Quand est venue l’opportunité de passer le cap pour brasser ma première bière, j’ai vécu un curieux mélange d’émotions.
D’abord, l’excitation : whaaaaou ! Putain ça y est ! Après ces années à créer dans ma cuisine, je vais enfin passer à la vitesse supérieure !
Et très vite, la peur : et si ça foirait ? Et si je foutais 10 hl à la poubelle ? Et si c’était mauvais ? Et si ça ne refermentait pas ? Et si c’était infecté ?
Tout un tas de peurs qui ressurgissent.
Complètement irrationnel.
À cet instant, j’avais deux choix :
J’aurais vécu la première solution comme un échec. Et ce sentiment était plus fort que la peur de balancer 10hl à la poubelle : à un moment, faut y aller.
J’ai choisi de partir sur la petite sœur d’une bière que j’avais déjà brassée en 20 litres, que j’avais pris plaisir à fabriquer et pour laquelle les retours ont été très constructifs.
J’ai choisi de me reposer sur une expérience concrète, un point de repère pour me guider.
Je suis parti sur une IPA bien maltée à 7,5%.
Dans les faits, cela revenait à pousser la salle de brassage à ses limites :
Et ça a fonctionné.
Je veux dire, le processus est allé au bout.
Malgré les longues filtrations, la fermentation s’est correctement déroulée, les arômes étaient présents, l’équilibre visé également et la pétillance bien dosée.
Pourtant, ça a été un échec commercial.
Car, têtu que je suis, je voulais à tout prix pousser les limites. Péter les dogmes, m’y frotter moi-même pour comprendre comment jouer avec.
Mais j’ai fait une grosse erreur : j’ai pensé à moi avant de penser aux clients.
J’étais tellement convaincu que ça allait se vendre, parce que moi j’aimais ça, que je n’ai pas pris le temps d’évaluer le marché ni la clientèle de la brasserie.
Une IPA maltée à 7,5% en soirée, ça fait des dégâts ! Et en plein été sous le cagnard, c’était franchement une mauvaise idée.
Et pourtant je suis super fier d’avoir osé me frotter aussi vite aux limites du matos.
Parce que ça m’a permis de mieux comprendre le process et les marges de manœuvre, de sortir de ma zone de confort et de me montrer que j’étais capable de m’adapter, ce qui a clairement contribué à me décomplexer sur les possibilités de création.
Si tu te demandes “comment faire pour ne pas avoir peur de balancer un brassin à l’égout”, voici quelques conseils :
Et surtout :
Et toi, quelle serait ta stratégie pour brasser ta première bière personnelle en tant que pro ?