Je garde en tête, encore aujourd’hui, le discours de bienvenue du directeur, mon premier jour de math-sup en septembre 2006. 


“Vous êtes l’élite de la Nation”.


Six ans plus tard, je reçois un beau diplôme. Un beau diplôme d’ingénieur.


Puis je me fais embaucher dans une PME vendéenne. 


Confort de vie, sans le stress d’une grande ville, dans un cadre calme et verdoyant.


Salaire confortable.


Situation confortable.


Mais je m’ennuie.


Alors je décide de sortir de ma zone de confort.

Ou plutôt, j’étends ma zone de confort.


Je démissionne de mon poste d’ingé pour redescendre en bas de l’échelle.


Je deviens brasseur.


J’apprends à ouvrir un sac de malt, dédrêcher, brancher des tuyaux et amorcer des pompes. 

J’apprends à régler une embouteilleuse, une encartonneuse et monter des palettes dans des racks.

J’apprends à nettoyer un fermenteur, utiliser un hop-gun et éviter des douches de houblon.

J’apprends à démonter une salle de brassage, la déplacer dans un autre bâtiment, puis la remonter.

J’apprends à enfûter une bière, régler une install de bar et servir des pintes à la pelle.


Au début, c’est dur, mais je m’accroche.


Puis ça fonctionne, je me sens libre. 


Je mets enfin du sens.


Situation confortable.


Puis je me sens à nouveau enfermé, bloqué sous un plafond de verre qui m’empêche de grandir.


Je pousse, je pousse. Trop. Burn-out.


Une opportunité se présente.


De rentrer à la maison. A Brest, chez moi. 


Je la saisis.


Et je suis bien mieux payé que lorsque j’étais ingénieur.


Parce que la brasserie où je travaille avait besoin d’un profil comme le miens. 


Et j’ai bluffé. C’est passé.


Situation confortable.


Aujourd’hui je ressens à nouveau ce sentiment d’enfermement, ce blocage sous ce plafond de verre qui m’empêche de grandir.


Mais j’ai acquis cette expérience, j’ai vécu ces moments.


Et je sais que ça aidera quelqu’un. 


Si tu es là avec moi chaque semaine, c’est que tu es ce quelqu’un.



S’il y a bien une chose que j’ai apprise en dix ans, c’est que la notion de confort évolue. Elle dépend de la situation du moment et de notre rapport à celle-ci.


Elle se trouve à la jonction de cet équilibre subtil et mouvant entre liberté et sécurité


Pour ma part, aujourd’hui, c’est très clair :

  • Liberté de te parler honnêtement de mon vécu, d’échanger sur ton expérience et de répondre à tes questions.
  • Liberté de créer de nouveaux assemblages et d’adapter le process.
  • Liberté d’organiser mes journées avec mon équipe, au son des pompes & des machines, des odeurs de céréales chaudes du matin aux arômes enivrants de fermentation.
  • Sécurité de garder mon salaire pour nourrir mon fils, payer mes factures, le gasoil de ma bagnole et les pintes qu’on s’enquille.


Je ne te dis pas de tout quitter sur un coup de tête. Tu es peut-être en couple, tu as peut-être des enfants à nourrir ou un prêt à rembourser.


Mais je t’invite à te poser cette question : il se situe où, toi, ton équilibre entre liberté et sécurité ?