Salut, c’est Sébastien,

J’ai reçu une question très intéressante, de la part d’un abonné :

 

Comment éviter de se mettre une trop grosse pression qui pourrait nous amener à faire des conneries ?

 

Brasser de la bière, c’est un métier à 80% routinier. Une fois que t’as compris le principe, t’as compris le métier. Ensuite, ce n’est plus “que” de l’expérience (15%), des expérimentations (4-5%) et des problèmes à résoudre.

 

La véritable question, donc, ça n’est pas d’éviter les conneries.

 

La vraie question, c’est d’accepter les risques.

 

Il y a plein de façons de travailler sur cet aspect.

 

Aujourd’hui je te propose d’en décortiquer trois qui, pour moi, sont les plus importants :

  • travailler sur soi,
  • voir comme un jeu,
  • développer des méthodes.

1. Accepter le risque

Y a rien de pire que de suivre des conseils extérieurs, de gourous du développement personnels, qui te parlent de méditation à 5h du mat ou de sauter à l’élastique, sans aucune nuance.

 

Par exemple, il y a des gens, si tu les balances dans une piscine pour qu’ils apprennent à nager, ils s’adaptent et réussissent facilement. D’autres développent une phobie de l’eau qu’ils mettront des années à surmonter.

 

La solution, c’est de choisir selon ta personnalité, en te demandant : comment, TOI, tu gères la prise de risque.

 

Par petits pas, ou comme un gros bourrin ?

 

(j’ai déjà écrit un article sur un sujet similaire, tu le trouveras ici).

 

Pour ça, il suffit de puiser dans ton parcours de vie, dans ton expérience.

 

Ce qui a marché pour moi, c’est d’y aller petit à petit d’abord, puis comme un bourrin ensuite.

 

Apprendre à créer des trucs à la guitare.

 

Jouer sur scène.

 

Apprendre à tomber en roller.

 

Jouer des matches devant un public.

 

Et quand je me suis senti suffisamment serein et solide, j’ai opté pour la méthode du bourrin : lâcher ma prise d’un mur d’escalade, le point d’accroche le plus bas étant sous mes pieds.

 

Pour moi, c’était le lâcher-prise ultime : laisser ma vie entre les mains de quelqu’un d’autre.

 

Littéralement.

 

J’en ai les mains moites, à te raconter cette histoire.

 

Mais je me souviens aussi de la sensation de libération que j’ai ressentie.

2. Voir comme un jeu

Je t’en ai déjà parlé dans cet article, garder son âme d’enfant est indispensable.

 

Quand j’étais ingé, j’abordais mon boulot de façon très sérieuse.

 

Mais je m’ennuyais.

 

Quand je suis devenu brasseur, je me donnais alors des challenges ludiques pour me stimuler et booster mon énergie :

 

  • Dédrêcher le plus rapidement possible, en tenant un tableau des scores ;
  • Viser les 66,6 °C dans le fermenteur, au lancement de la soude ;
  • Maintenir ma température d’entonnement au 1/10 de degré près ;
  • Nettoyer un fût et le remplir dans la foulée ;
  • Laisser les bouteilles s’accumuler en sortie d’embouteillage, pour les sortir le plus vite possible ;

 

Tu penses peut-être que ça n’a servi à rien d’autre que m’occuper.

 

En apparence, c’est vrai.

 

Mais en creusant, c’est tout autre chose.

 

Car grâce à ces challenges ludiques, j’ai appris à connaitre mon process, toucher ses limites et trouver des points d’optimisation, pour :

 

  • Organiser sereinement la prod en vue des doubles brassins (et donc améliorer la productivité de l’outil) ;
  • Assurer précision et répétabilité dans le process de nettoyage ;
  • Libérer mon esprit pendant les 45 minutes d’entonnement, pour passer des commandes, planifier la prod ou rédiger les textes sur les bières ;
  • Booster notre productivité d’enfûtage en été, sans investir dans des fûts supplémentaires (en remplissant les fûts revenus sales le jour même) ;
  • Gagner du temps à l’embouteillage en mettant directement les palettes en chambre chaude, plutôt qu’attendre la fin de journée.

3. Mettre en place des méthodes

Grâce à cette meilleure connaissance de moi et des risques mesurés que j’ai appris à prendre, j’arrive à développer des méthodes.

 

Et la magie des méthodes, c’est qu’elles occultent les émotions liées aux risques.

 

Car les émotions, c’est un formidable ennemi à la prise de décision.

 

Quand j’ai proposé le plan de développement de la brasserie sur 2020-2021, les réponses que j’ai obtenues étaient toutes drivées par des peurs (surmenage, échec, inconnu) :

 

  • Lancer une éphémère par mois ?
  • En plus de passer de 2400 à 3500 hl à l’année ?
  • En plus d’améliorer la qualité des produits ?
  • En plus d’améliorer les conditions de travail ?
  • En plus de gérer une équipe de 5 personnes ?
  • En plus de recruter un nouveau commercial ?
  • En plus de lancer un e-shop ?
  • En plus de lancer une newsletter ?

Oui, ça fait beaucoup, balancé comme ça.

 

Mais ça devient très facile avec de bonnes méthodes, des techniques adaptées, une approche mesurée et une stratégie claire.

 

Un plan de route, construit à partir d’observations et d’analyses, froid et factuel.

Conclusion

Si j’avais voulu développer cette équipe avec mes émotions, mes peurs et mes incertitudes, on n’aurait jamais autant avancé.

 

Si j’avais voulu avancer à l’arrache sans trop savoir où j’allais, on se serait crashé en route.

 

Si on avait occulté l’amusement, les challenges et la bonne humeur, on aurait perdu de vue ce qui nous fait vibrer.

 


Le combo gagnant est simple : jouer, de façon méthodique, en prenant des risques mesurés.

 

Essaye ça dans ta brasserie ou pour construire ton projet,

 

Et dis moi ce que ça donne !

 

Bonne semaine à toi,

 

À vendredi,

 

Sébastien